Confort : influence sur les performances et le plaisir de rouler

Le confort est un paramètre qui a déjà traversé ce dossier dans plusieurs articles, la rigidité et l’aérodynamisme notamment. Il s’agit bien souvent d’un aspect qui se limite aux vélos d’entrée de gamme, pour les débutants. Mais j’aimerais que l’on m’explique pourquoi les cyclistes chevronné·es devraient sacrifier leur confort ? Le confort est-il l’ennemi de la performance ?

J’ai pour habitude de dire à mes client·es que le confort est le rendement dès que l’on passe plus de 2 heures sur le vélo. En effet, avec un vélo sur lequel vous n’êtes pas bien, il y a peu de chance que vous mainteniez une belle moyenne horaire très longtemps. Cela se traduit d’ailleurs dans le discours marketing des grandes marques où le confort pointe, parfois, son nez dans les gammes dédiées à la longue distance.

D’où vient le confort d’un vélo ?

Encore une fois, si l’on veut rentrer concrètement dans les paramètres qui font le confort d’un vélo, les choses se compliquent. Il y a un nombre important de paramètres sur lesquels va reposer le confort, notamment dans le choix des composants (selle, cintre…) Personnellement je vois 2 grandes catégories :

  • La position sur le vélo
  • Les composants
  • Le confort du cadre et de la fourche

Rentrons plus en détails dans chacune de ces catégories.

La position, la plus-value de l’étude posturale

Il n’y a rien de pire qu’une mauvaise position pour vous faire regretter de faire du vélo. Pourtant, il suffit de faire un tour sur les routes iséroises, particulièrement fréquentées par les cyclistes l’été, pour se rendre compte que beaucoup de gens sont loin de l’optimum de confort sur leur vélo de route ! Il faut dire que lorsque vous achetez un vélo, les choix et réglages possibles ne sont pas nombreux, et de moins en moins.

Vous avez le choix entre les différentes tailles de cadre, 5 ou 6 le plus souvent. Alors vous pouvez modifier la hauteur de selle assez facilement, vous avez quelques centimètres de latitude sur la position horizontale de la selle et vous pouvez parfois jouer sur la hauteur du guidon en intervertissant les bagues de direction.

Il y a encore peu, on pouvait changer facilement la potence, ce qui apportait une certaine latitude sur la position du guidon, mais avec l’intégration totale des gaines et durites dans le « cockpit » qui se doit d’être intégré, cela devient de plus en plus difficile. Pour une question d’aérodynamisme (cf. l’article sur le sujet), vous n’avez plus vraiment la possibilité de modifier votre position sur le guidon.

Comment définit-on la position ?

Votre position sur le vélo est entièrement déterminée par 5 longueurs qui déterminent la position relative de chacun des 3 points d’appui : les pédales, la selle et le cintre. Trois concernent le bas du corps :

  • Hauteur de selle
  • Recul de selle
  • Longueur des manivelles

Et deux le haut du corps :

  • Distance selle-cintre
  • Différence de hauteur entre la selle et le cintre

Pour bien comprendre de quoi parle-t-on, je les ai représentés sur le plan d’un vélo de route :

Chacune de ces longueurs va jouer à la manière sur votre confort, mais aussi sur votre rendement. Elles sont propres à chacun·e et diffèrent beaucoup d’une personne à l’autre, même pour une taille identique. Cela va dépendre de votre morphologie, de votre souplesse et de votre pratique. Personnellement, mis à part passer par une étude posturale ou avoir de la chance, je ne vois pas bien comment l’on peut trouver la bonne combinaison de ces 5 facteurs !

L’étude posturale

Chez les cycles Cattin, l’étude posturale consiste à vous faire pédaler sur notre ancestral vélo d’étude posturale, construit il y a plus de 30 ans par Daniel Cattin. Il est réglable facilement sur toutes les longueurs déterminantes et on peut aussi changer facilement les points d’appui. Il permet de couvrir une très large gamme de tailles puisqu’il a vu passer des cyclistes de plus de 2 m (2,07 m pour le plus grand) et d’autres de moins de 1,5 m (1,42 m pour la plus petite).

Le résultat de l’étude posturale ne découle pas d’une optimisation de la puissance délivrée comme c’est souvent le cas avec les machines d’études posturales que l’on trouve dans les grands magasins, mais d’un échange entre la personne faisant l’étude et moi. Je cherche à déterminer la position qui me semble maximiser le couple confort/rendement en tenant compte de votre ressenti. Le résultat est parfois surprenant, mais il est rare que cela ne conduise pas à une amélioration drastique du confort et du plaisir de rouler !

Je ferai bientôt un article complet sur l’étude posturale telle que je la pratique.

Le rôle des composants dans le confort

Les points d’appui

L’étude posturale est aussi un moment privilégié pour tester des composants primordiaux pour le confort : les points d’appui, pédales, selle et cintre.

Les pédales

Comme je ne vends pas de chaussures, mon action est limitée du côté des pieds. Néanmoins, il y a des choses à dire, notamment autour des différents types de pédales automatiques ou la présence ou non de cale-pied sur les pédales plates.

La selle

Bien sûr, le gros morceau est la selle, source de tant de douleurs pour tant de monde. Il s’agit avant tout d’un problème personnel qui ne peut être résolu d’un coup de baguette magique chez tout le monde par le même produit. Quand je lis, par exemple, qu’une Brooks B17 est la meilleure solution pour ne plus avoir mal aux fesses (idée très répandue dans le monde du voyage à vélo), cela me fait toujours un peu rigoler.

Certes les selles en cuir ont un grand intérêt, celui de se déformer avec le temps et de s’adapter à votre morphologie. Cela peut être la seule solution pour certaines personnes qui ne sont jamais bien sur une selle. Mais la B17 ne me semble pas être une très bonne selle dans l’absolu et certainement pas la meilleure selle en cuir ni la plus confortable du marché. Les selles Berthoud et Idéale (après un rodage qui peut être un peu long) sont de bien meilleurs produits, certes plus chers mais qui dureront aussi beaucoup plus longtemps.

Mais certaines selles, même d’entrée de gamme, peuvent être de très bons produits. Ma doctrine est de laisser choisir le ou la client·e en faisant tester différents modèles lors de l’étude posturale. Il est possible aussi de tester les différentes selles lors de sorties plus longues que l’heure d’étude posturale. Et statistiquement, ce sont les selles SMP qui finissent le plus souvent montées sur les vélos que je fabrique et même si, personnellement, je ne suis pas bien dessus !

Le cintre

Dernier des trois points d’appui évoqués, le cintre a aussi une importance fondamentale, même si les cyclistes s’en plaignent moins que de leur selle. Il joue un rôle important dans l’ergonomie du vélo, en offrant par exemple la possibilité de changer de position, libérant ainsi les contraintes dans les mains et les épaules.

Un peu comme pour les selles, il existe une multitude de cintres différents, même pour un vélo de route. Il y a le classique guidon de course, que l’on trouve dans de nombreuses variantes de largeurs, extension (reach) et profondeur (drop). Il y a le guidon de gravel, plus récent, avec sa partie verticale inclinée (le flare, entre 15° et 30°), diminuant la profondeur et rendant la partie basse plus facile accessible. Ceci offre un gain de confort mais perte en aérodynamisme, notamment parce que les coudes ne sont plus rentrés contre le corps. La guidoline joue aussi un rôle très important dans le confort du poste de pilotage.

Mais il y a aussi le guidon plat, qui peut tout à fait être monté sur un vélo de route. S’il est équipé de cornes (intégrées ou non), il offre la même ergonomie que la partie haute d’un guidon de course, avec une position des freins plus sécurisante.

Pneus, tiges de selle, voire potence

D’autres composants jouent un rôle, que parfois ils ne devraient pas jouer, dans le confort d’un vélo.

Les pneus

Avec l’avènement des cadres et jantes en carbone, le confort des vélos industriels a commencé à dépendre très fortement, des seuls pneus. Hors le confort, réel, qu’offre un pneu, dépend principalement de son gonflage et de sa souplesse. Or, pour sous-gonfler un pneu sans prendre le risque de crever au premier nid de poule, il faut qu’il soit suffisamment gros (en section).

Un vélo de route commercial, de nos jours, est équipé de pneus de 28 mm quand ce n’est pas du 30 voire du 32 mm. Impensable il y a à peine 10 ans lorsque tout le monde roulait en 23 mm. Outre l’augmentation de l’adhérence nécessitée par les freins à disques, ces gros pneus offrent un confort bien venu sur un vélo. Mais d’un point de vue des performances, notamment en montée, ce n’est pas vraiment un progrès. En effet, le poids nettement plus important augmente fortement l’inertie de la roue1. En découle un comportement plus pataud lors des changements de rythme, très fréquents lors des ascensions.

Les autres composants

D’autres composants du vélo peuvent être source de confort, notamment la tige de selle. Cette dernière peut avoir une légère flexibilité qui apporte un peu de souplesse. C’est vrai notamment pour les tiges de selle ronde, de petit diamètre avec une grande sortie de selle. Si celle-ci a une forme aérodynamique, la flexibilité disparaît. Les fabricants de tige de selles font aussi des modèles offrant aussi naturellement de la souplesse, notamment pour le gravel. Mais dans tous les cas, cet effet doit rester faible, sinon la qualité du pédalage en pâtit (une partie de votre effort de pédalage sert à tordre la tige de selle).

On voit poindre aussi régulièrement des potences offrant, si ce n’est de l’amorti, au moins une forme de souplesse. Je ne sais pas si c’est vraiment une bonne idée et pas simplement un aveu d’échec de l’industrie à faire des vélos confortables.

Cadre et fourche

Plus que la potence ou la tige de selle, le cadre et la fourche peuvent être des sources importantes de confort sur un vélo de route. Mais cela ne doit pas être fait n’importe comment.

Cadre et fourche de route pour des roues de 650B

La cadre

Nous avons déjà évoqué cet aspect dans l’article sur la rigidité. La souplesse d’un cadre va permettre un gain de confort, notamment grâce à la filtration des vibrations de la route. Bien entendu, trop de souplesse (ou un manque d’élasticité) va conduire à une perte de rendement important et faire du vélo un chewing-gum.

Le meilleur rapport filtration/rendement, pour un·e cyclotouriste, est obtenu par les cadres en acier et titane (et parfois certains anciens carbone) avec des tubes ronds de section contenue. Le gain de confort par rapport à un cadre en alu ou en carbone est tout à fait significatif. J’en ai moi-même fait l’expérience lorsque j’ai troqué mon Cannondale Caad 5 pour mon premier vélo de route Cattin. Le plaisir de rouler sur les mauvaises routes iséroises s’est trouvé décuplé. Et ce résultat est possible malgré un cadre beaucoup plus court (bases de 390 mm) et plus nerveux.

La fourche

La fourche est souvent mentionnée comme élément de confort, ou plus précisément l’inverse, pour être source de manque de confort. C’est d’autant plus le cas pour les fourches en carbone contemporaines pour frein à disque qui misent tout sur la rigidité. C’est évident que par rapport à une fourche des années 60 pour cantilever, la différence de souplesse est stratosphérique, l’une bouge de moins d’1 mm quand l’autre se déplace de plus d’1 cm !

Fourche truss d’un vélo de route en frein à disque pour un cycliste de plus de 2m.

Néanmoins, le problème doit être vu sous un angle différent. Une fourche à frein à disque qui se déforme n’est pas une très bonne idée. Compte tenu des efforts importants sur la fourche qu’induit le frein à disque, la souplesse va causer un mauvais freinage et un phénomène de broutage. Mieux vaut donc une fourche rigide. Pour plus de détails sur ce sujet je vous invite à lire l’article sur les fourches truss qui traite, entre autres, de ce sujet. C’est moins le cas avec les autres freins, même si ça peut être problématique aussi.

Pour le moi, la fourche n’est donc pas à proprement parler un élément de confort, d’autant moins pour les freins à disque.

Le confort, un vaste chantier

Pour conclure cette partie, la plus dense du dossier, on peut dire que le confort est un aspect primordial, complexe et pas très bien traité par l’industrie, notamment à cause du tropisme rigidité/aérodynamisme. A l’opposé, un vélo artisanal en acier sur mesure pourra répondre de manière beaucoup plus approfondie à cet aspect, avec des matériaux adaptés, un choix de composants judicieux et surtout une position aux petits oignons grâce à une étude posturale.

Cet article, comme nos vélos, a été écrit par un humain pour des humains. Il continent donc d’authentiques fautes d’orthographe et d’errances syntaxiques. Profitez-en cela va devenir rare.

  1. Le poids d’un pneu Continental Grand Prix 5000 est de 215 g en 25 mm et 260 g en 30 mm. Cela représente une augmentation de presque 10 % du moment d’inertie de la roue. ↩︎

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